TREK GOKYO – Jour 1 – 4 Octobre – Namche Bazar (3450 m) → Dhole (4100 m) – 7h – 11,2 km – Dénivelé positif 950 m , négatif 300 m : Aujourd’hui grand départ vers Gokyo et les inconnues qui vont avec : comment allons-nous réagir au mal des montagnes ? Allons-nous avoir assez de souffle avec la raréfaction de l’oxygène (-50% à 5 000 m) ? Sommes-nous assez équipés pour résister à la vague de froid avec chute de neige annoncée par la météo ?
Après 1h de marche en corniche (tronçon presque plat, très rare ici), nous attaquons une montée bien raide en compagnie d’une mamie sherpa, encore plus essoufflée que nous, qui marche en égrainant son chapelet tout en récitant ses prières. Nous atteignons après 2h de marche lente et 500 m de dénivelé Mong-La à 3980 m. Loupé ! Même en montant sur le stupa (ce qui n’est pas OK, même si certains touristes irrespectueux le font), nous ne pourrons pas dépasser les 4 000 m cette fois-ci ! Gros coup au moral ensuite : 300 m de descente raide. Même si nous nous y attendions, perdre aussi vite ce que nous avons mis tant de temps à gagner, ça reste décourageant car relève de la ‘double peine’ : il faudra rattraper cette perte d’altitude dans la journée… et la remonter au retour. A la fin de la descente, le village de Phortse Tanga est constitué d’une unique maison qui fait lodge. Première grande première : nous croisons nos premiers yaks qui, avec l’altitude, remplacent désormais les dzos. Ils sont bien plus poilus et massifs que ces derniers. Nous constatons le rôle fondamental joué par les bouses de yaks qui sèchent de partout (photo ci-dessous) dans les hameaux et sont vite recouvertes dès que l’humidité arrive. C’est la seule source d’alimentation des uniques poêles des salles communes. Les bouteilles de gaz montées à dos de yaks servent pour la cuisine. La 3ème source de chaleur est constituée par les paraboles inox qui concentrent les rayons solaires sur une bouilloire accrochée à leur foyer. Très efficace, impossible de tenir la main au foyer alors qu’il fait froid à l’extérieur.
– Seconde grande première : dans la forêt que nous traversons pour la montée de 400 m vers Dhole apparaissent les premiers rhododendrons (à droite). Ici ce sont de véritables arbres. Pour la floraison qui pare la forêt de rose, faudra revenir en avril.
– Troisième grande première : nous dépassons les 4000 m, notre record en trek, peu avant l’arrivée au tout mignon hameau de Dhole. Plus de 900 m de dénivelé positif plutôt raide et 300 m en négatif raide, le tout sans ampoules, ni courbatures, ni fatigue à 4 000 m d’altitude, on est super contents. L’aventure va donc pouvoir se poursuivre demain. Ensuite nous faisons mieux que les poules : repas à 17h dans la salle commune, la seule pièce chauffée, avec un poêle central fonctionnant à la bouse de yak séchée. Et dodo avant 20h00 ! … C’est la Quatrième et dernière grande première de la journée.
TREK GOKYO – Jour 2 – 5 Octobre Dhole (4100 m) → Machhermo (4400 m) – 3h30 – 5,3 km – Dénivelé positif 500 m négatif 80 m : Ce matin, pluie et verglas étaient prévus et au lieu de cela, les nuages se dégagent. Nous découvrons petit à petit les imposants sommets qui nous entourent. Peu connus, le Thamserku (6608 m) à droite, et le Kangtega (6885 m) à gauche sur la photo ci-dessus veillent verticalement sur l’entrée de la vallée. Puis de l’autre côté de la rivière apparaissent le Tabuche (6367 m) ci dessous et le Cholatse (6335 m) encore en dessous.
On se croirait dans les Alpes si nous n’avions pas ces monstres 2 à 4 000 m au-dessus de nos têtes : des alpages où fleurissent des gentianes et des prairies vertes immaculées : les bouses sont précieusement ramassées pour le chauffage. Mais disons-le franchement, la bouse de yak est décevante si l’on compare la carrure de l’animal avec nos frêles vaches françaises. Car nos bouses hexagonales en imposent bien plus. Du coup, on pourrait se chauffer encore plus efficacement qu’ici, ce qui nous permettrait peut-être de fermer quelques centrales nucléaires, non ?
Le démarrage est un peu raide sur le petit déjeuner avec 100 m de dénivelé d’un coup, puis le sentier devient pépère, au manque d’oxygène près. Nous nous régalons sur ce trek peu fréquenté, mais un minimum tout de même pour se sentir en sécurité et faire de belles rencontres. Dans cette région du Khumbu où la marche est reine, nous nous attendions à croiser une large majorité de Français comme partout ailleurs dès qu’il il y a de la rando dans l’air. Pas du tout, les Australiens, Allemands, Néerlandais, Américains et Japonais sont les plus présents. Tiens au fait, comment reconnait-on les Japonais dans l’Himalaya ? Facile, ils ont le look des Chinois : le chapeau et pas un cm² de peau qui ne dépasse. Aucun rayon de soleil ne doit altérer sa blancheur. Et comment sait-on que ce ne sont pas des Chinois ? Parce qu’ils tiennent plus d’une minute sans faire de selfies, parce qu’ils sont sympas, et qu’un Chinois ne s’éloigne jamais à plus de 100 m de son bus. Et ici, le premier bus est à …. 5 jours de marche.
Arrivée en 3h30 à Machhermo, blotti au creux d’un départ de vallée latérale. Nous avons atteint 4 400 m ! Nous pourrions continuer plus haut car physiquement nous sommes en forme, mais pour le mal des montagnes, pas plus de 400 m de dénivelé par jour. Et comme nous venons de croiser un Japonaise qui redescendait totalement explosée, pas question de faire les kadors.
TREK GOKYO – Jour 3 – 6 Octobre – Machhermo – 4400 m → Gokyo – 4800 m – 3 h – 7 km – Dénivelé positif 450m, négatif 50 m
Cette nuit, nous avons entendu des vomissements à deux reprises. Peut-être notre porteur ? Car au moment de partir à 7h du matin, il nous dit qu’il ne peut plus monter, qu’il est malade. Nous n’insistons pas car c’est probablement le mal des montagnes et il faut qu’il redescende au plus vite. Nous lui donnons des médicaments et de quoi se payer plein de visites chez le médecin d’ici. Second porteur avec charge légère qui abandonne au pays des Sherpas, alors que nous qui débarquons de la mer, surprenant non ? Cela mérite une explication que vous trouverez plus bas dans les infos pratiques.
Heureusement, un jeune de l’hôtel, Shikhar Raï, se propose de remplacer notre porteur malade. Il est bien plus sympa que les deux précédents porteurs et parle un peu plus Anglais. On y va donc vers 8h juste après la Française d’Allemagne qui file vite avec son taux d’oxygène de 87%. Le fond de la vallée de Machhermo est somptueux en se dégageant : un cirque de Gavarnie, mais petite différence, avec une aiguille verticale de mille mètres posée dessus : le Kyajo Ri (ci-dessus). Et en montant, les nuages continuent à se dégager pour laisser apercevoir tout au fond de la vallée, le Cho-Oyu (8 188 m) et ses collègues qui délimitent la frontière avec le Tibet (ci-dessous).
et le Cholo (6089 m) en avant-poste, dominant la moraine latérale et le glacier.
tabulaire. Après une bonne montée dans la moraine, arrivée au premier lac, relativement petit mais déjà magnifique. Puis avec une marche cool, arrive le second, qui en impose avec sa coupeur turquoise et ses grandes Jorasses noires qui le surplombent. Puis une demi-heure après arrive le troisième lac, celui du village de Gokyo, encore plus majestueux : même couleur turquoise que le précédent mais panorama encore plus large sur le Renjo-La et toutes les montagnes qui entourent le col. On ne sait plus où donner des yeux et des appareils photos. D’ailleurs la luminosité est telle que Phi, déjà fragile de ce côté-là, doit superposer une seconde paire de lunette de soleil catégorie 4 pour tenir. Quelques yaks paissent tranquillement le long du lac ce qui lui donne un charme encore plus grand. Cà y est, nous avons atteint le Mont-Blanc… son altitude du moins. Trop heureux d’ être parvenus sans trop de difficultés, à ce terminus de la civilisation humaine : plus une habitation, plus une cabane après Gokyo. Nous repérons l’hôtel qui semble le plus récent, le Thanka, en espérant trouver une chambre propre avec bonnes couettes et WC pas dans la nature au froid. Et c’est le cas pour pas beaucoup plus cher que les autres. On négocie pour que notre porteur puisse être logé et nourri avec nous. La neige annoncée tombe finalement cet après-midi. Et bien sûr elle tient… La montagne que nous espérions gravir demain, le Gokyo Ri est blanche en quelques minutes… Ci-dessous à gauche,, vue de notre chambre en arrivant, à droite 1/2h après.
Nous découvrons tous les deux en même temps à notre arrivée à Gokyo, la toux du Khumbu. L’air est trop froid et sec pour les bronches et quasiment tout le monde tousse ici. Cette toux tenace qui peut déclencher des quintes phénoménales par moments, ne va plus nous lâcher.